Lutte contre le tabagisme : The Economist s’engage

Selma El Madani

Dans le cadre des débats autour des enjeux de santé publique relatifs à la lutte contre le tabagisme, l’hebdomadaire britannique The Economist, a pris position en faveur d’une politique de réduction des risques. Face aux dangers du tabac, l’hebdomadaire britannique prône une approche pragmatique

Face aux défenseurs d’une politique « 0 tabac », les partisans de la réduction des risques (ou « harm reduction ») sont de plus en plus nombreux en Europe. Un basculement notamment perceptible en Grande-Bretagne, où les autorités publiques jouent de plus en plus la carte de la limitation des risques plutôt que les politiques répressives ou d’abstinence pure.

C’est dans ce contexte que The Economist a publié, le 18 décembre dernier, un article intitulé « How to regulate lower risk smoking products » (Comment réguler les produits alternatifs à la cigarette). Ou comment de deux maux (cigarettes et produits alternatifs à la cigarette), choisir le moindre.

Par pragmatisme, et sans aucune naïveté quant aux intérêts économiques derrière ces produits (en rappelant leur passif en la matière), ni sur leurs dangers potentiels, le journal prend position en faveur d’une législation assouplie autour de ces produits afin de détourner de plus en plus de fumeurs de la cigarette au nom de la réduction des risques.

« Il n’est gère judicieux de traiter tous les produits comme s’ils étaient aussi mauvais pour la santé les uns que les autres, alors qu’un l’un d’entre eux est connu pour être mortel et que les autres sont clairement moins nocifs », affirme l’hebdomadaire, classé au centre-gauche de l’échiquier politique britannique et réputé pour ses articles d’analyse.

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The Economist est coutumier des prises de position tranchées, parfois à contre-courant de la société anglaise, sur des sujets comme la défense du mariage homosexuel, de la légalisation de certaines drogues, et même en faveur d’un étatisme qu’il juge justifié (contrôle des armes, couverture de santé universelle).

Derrière cet article, c’est toute la mouvance de réduction des risques que l’on retrouve. Un concept qui consiste à considérer comme favorables tous les moyens permettant de limiter la consommation des cigarettes. Et d’inciter les fumeurs à décrocher, en douceur et temporairement si besoin, plutôt que de les faire culpabiliser. Outre la Grande-Bretagne, l’Allemagne et le Portugal sont des précurseurs en ce domaine en Europe. Les Etats-Unis commencent à suivre la même voie.

Le concept de « réduction des risques » s’applique d’ailleurs à de nombreux autres domaines (toxicologie, alcoolisme, sécurité routière…). En matière tabacologie, il s’agit essentiellement de promouvoir des moyens de consommation du tabac alternatifs à la cigarette, tels que les patchs et chewing-gums à la nicotine, les e-cigarette, ou plus récemment le tabac à chauffer. Des produits addictifs, non dénués de dangers, mais largement moins que la cigarette, d’après toutes les études scientifiques sur le sujet (95% moins nocif, selon une récente étude du ministère de la santé britannique).

Suffisant pour que la rédaction de The Economist choisisse de prendre le parti d’un changement de paradigme en matière de santé publique. Une initiative dont l’impact sera donc à suivre.